- Fantasy, Fantasy Historique

Ars Obscura, tome 1 : Sorcier d’Empire, de François Baranger

Genre : Fantasy.
Première édition : 2023 en VF.
Présentation de l’éditeur : « Et si la magie avait réussi là où Napoléon a échoué ?
1815.
L’empire de Napoléon s’étend des îles Britanniques aux frontières de la Russie. Rien ne semble pouvoir lui résister. Ses victoires, il les doit à un homme surgi de nulle part : Élégast. Celui-ci est, en effet, le seul à maîtriser ce qui ressemble à de la magie véritable : l’Art Obscur. Il est nommé sorcier d’empire.
Cette nomination ne plaît pas à tout le monde dans les rangs des généraux, car Napoléon, aidé par ce sorcier, ne serait-il pas en train de perdre le génie stratégique qui lui a valu tant de victoires ? Dans le même temps, des phénomènes surnaturels surviennent. Des hémisphères noirs de grande taille surgissent de manière aléatoire un peu partout en France et, surtout, d’abominables créatures en sont rejetées : les résurgions.
Russes, Prussiens, Ottomans et ce qu’il reste de l’armée anglaise en exil pourraient en profiter pour préparer, dans le plus grand secret, une contre-offensive capitale.
Un roman haletant où se dévoile, page après page, un monde qui n’est pas tout à fait le nôtre : un monde de magie, d’aventures et d’histoire. »


Ma chronique :

France, 1815 : Napoléon règne sur toute l’Europe !

Soutenu par le sorcier Élégast, il a vaincu ses ennemis au fil des batailles. Mais les Anglais réfugiés au Caire espèrent un retournement, avec leurs alliés russes et tous ceux qui exècrent la France impériale trop puissante. Quand j’ai lu que l’Angleterre était sous domination française, mon sourire s’est élargi d’une oreille à l’autre. C’est mal ?

Revenons à l’histoire : dans une France uchronique, des bulles noires apparaissent parfois, ici et là. Elles se transforment en « résurgences » d’où s’échappent de terribles « résurgions », bêtes de diverses tailles et très dangereuses. Il est difficile de les éliminer : les voyageurs traversant les bois doivent être prudents.

Dans ce contexte, Ludwig gagne sa vie en traquant les résurgions. Personnage étrange et hors de la société qui ne se souvient plus de son enfance, il espère découvrir les secrets des bulles noires qui ont englouti sa femme et sa fille. Un jour, il secourt Éthelinge pourchassée par des Gardes Hérétiques, le corps d’armée du Sorcier Élégast qui constitue une armée dans l’armée. Éthelinge est la fille d’un savant mort pendant la campagne d’Égypte de Bonaparte, et elle est persuadée que son père a été tué. Son esprit scientifique la pousse à étudier la magie et à tenter de reproduire certains sorts. Or Ludwig se révèle avoir des dons qu’il ne comprend pas. Est-ce lié à son enfance ? Ce mystère se double d’un deuxième : ceux qui prétendent avoir des pouvoirs, en général des charlatans, sont assassinés les uns après les autres. Qui veut les éliminer ?

Ce roman choral donne la voix à de multiples narrateurs, offrant une vue d’ensemble des contextes et des actions : en France, en Angleterre, en Russie ; dans les campagnes, les casernes ou les palais impériaux ; parmi les soldats, les fugitifs ou les hommes de pouvoirs. On voyage beaucoup avec Sorcier d’Empire, on suit une scène à travers les yeux de divers personnages qui ont leur propre compréhension des événements, de l’espion anglais à la comtesse russe séductrice mais impitoyable avec les Bohémiens ; du frère du Tsar attiré par les sciences obscures au jeune serf effrayé par la barbarie d’une confrérie rêvant de la renaissance d’un dieu maléfique qui reposerait dans un sarcophage égyptien et renaîtrait grâce à un rituel sanglant ; du noble au service de Napoléon à l’officier de terrain ; et bien d’autres. Cette richesse de points de vue brosse un tableau vivant, en contrepartie d’une longue exposition qui dévoile les personnalités et les motivations de chacun. L’action ne manque pas à l’appel, bien au contraire, et chacun est mis en danger, d’autant plus que les dissensions dans chaque camp sont nombreuses.

Parlons de l’uchronie de fantasy : dans ce monde, la magie puissante avait disparu depuis des temps immémoriaux, même si certains se disaient dotés de pouvoirs. Ce n’était plus qu’un objet d’étude pour des lettrés et des superstitions diverses. Le point de départ de l’uchronie est l’apparition d’Élegast, présenté par Napoléon en 1803. L’empereur remporte alors des batailles grâce aux sorts et délaisse son génie militaire au grand dam des généraux qui se méfient de la Garde Hérétique et encore plus d’Élegast dont personne ne sait rien.

Plus le lecteur avance dans le roman, plus se dessine le schéma de l’Art Obscur, venant de temps oublié. Qui est exactement Élégast ? Que veut-il ? Napoléon a-t-il perdu son sens stratégique pour céder à la facilité d’un homme dont les motivations sont à craindre ? Quel danger viendra de la Russie ? Et quel sera le rôle de l’Angleterre ? La conspiration contre Élegast va-t-elle connaître le succès ? Et Élegast lui-même, jusqu’où va-t-il aller ?

De manière plus intimiste, on ne peut s’empêcher d’espérer pour quelques personnages attachants en mauvaise posture : le serf Pavel, Éthelinge à l’esprit scientifique, et Ludwig, qu’on devine le pilier de l’histoire.

Parlons un peu de l’univers : Élégast entrevoit l’avenir, ce qui lui permet de développer des outils et des armes utilisant sa magie et donnant une touche rétrofuturiste au roman. Grâce à une plume très travaillée et toujours fluide, l’auteur pose des ambiances prenantes et fait vivre un passé très proche de celui que nous connaissons, avec des parcelles de surnaturel — voire parfois d’horreur — bienvenues.

Le retournement de situation de la fin de ce tome, touchant certains des héros, donne très envie de continuer à découvrir la suite de la saga.

Autres chroniques dans la blogosphère : le nocher des livres, Boudicca – le bibliocosme, Lhotseshar, Lhisbei – RSF, Steven – Maven Litterae,

Ars Obscura, tome 1 : Sorcier d’Empire
Ars Obscura, tome 2 : Second Sorcier

Ars Obscura, tome 3
Ars Obscura, tome 4

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